La semaine du 3 au 7 novembre 2025, le collectif Tu es canon dont je fais partie a collaboré avec les étudiantexs de première année du Bachelor en Design Mode de la HEAD – Haute école d’art et de design de Genève.
Le but ? Les sensibiliser aux questions de l’inclusion au sein du monde de la mode : comment créer des vêtements adaptés à touxtes sans entrer dans un biais stigmatisant ? Prendre conscience que chaque individu à des besoins différents mais a surtout son propre style. Pendant trop longtemps, les vêtements destinés aux personnes ayant un handicap se sont limités à être « utilitaires », foulant aux pieds les envies vestimentaires.
À partir du thème des vêtements de pluie, explorés dans toutes leurs formes, ce workshop a permis de mettre en exergue le style et la personnalité de chaque membre du collectif (Amaya Canton Rodriguez, Alex Droz, Taís Dutra et moi-même) afin que les étudiantexs puissent s’en inspirer pour leur création.
En ce qui me concerne, deux groupes ont travaillé à partir de mon moodboard.
Le premier groupe (Naïma Brentini, Olivia Grey, Leandro Russo et Antoine Vaucher) s’est inspiré de mes études universitaires en histoire et anthropologie des religions. Iels ont imaginé une parka inspirée des robes que portait la gent féminine de la Manson family dans les années 1970, en la mixant avec des codes vestimentaires tantôt plus anciens telles les robes impériales, tantôt plus récents tels ceux du bomber. Ce groupe a bel et bien respecté mon style et ma personnalité. Néanmoins, les étudiantexs ont été confronté.e.s à deux problématiques : devoir respecter un timing assez serré, et l’envie de privilégier les aspects stylistiques au détriment de ceux utilitaires. Résultat : la capuche ne tenait pas en place. J’aime l’idée de provoquer en adoptant le style de la Manson family, mais ce n’est malheureusement pas cela qui empêchera la pluie de me tomber dessus !
Quant au deuxième groupe (Léo Harris, Nathalie Mach et Lucie Zimmermann), ilels sont partiexs sur l’idée d’un bomber oldschool plus classique. Cette fois, la capuche tenait en place et cet élément a été exploité avec un réflexion intéressante inspirée de mes tatouages :
« L’un des éléments les plus importants du projet a été le travail autour des tatouages d’Anissa. En discutant avec elle, nous avons été frappés par la place qu’ils occupent dans sa manière de se définir et de raconter son histoire. Nous avons alors imaginé un moyen de transposer ces marques identitaires dans le vêtement. Plutôt que d’en faire un motif purement ornemental, nous avons choisi de les interpréter sous forme de broderies matelassées, intégrées à l’intérieur de la capuche. Ce choix répondait à une volonté symbolique : tout comme le tatouage, la broderie est une trace intime, souvent invisible, mais profondément liée au corps et à la mémoire. En la plaçant à l’intérieur de la capuche, nous avons voulu exprimer cette tension entre intériorité et dévoilement. Lorsque la capuche est portée, le motif reste caché, intime ; lorsqu’elle est abaissée, il se révèle discrètement ».
Si cette fois la capuche tenait en place, les étudiantexs de ce groupe ont choisi en revanche une matière trop rigide pour les manches, ce qui m’a empêché de passer mes mains. Iels ont dû découper le tissu des manches en longueur afin de résoudre le problème.
On peut souligner que pour ces deux groupes le côté utilitaire est passé à la trappe, mais on applaudit fort leur imagination créative permettant d’ouvrir d’autres interrogations en perspective : un.e styliste peut-iel s’inspirer de criminel.les/tueur-ses en série dans ses créations ?
En conclusion, cette semaine de workshop a permis de mettre en lumière les problématiques que l’on retrouve encore aujourd’hui dans le monde de la mode. Nous pouvons observer, à travers ces exemples, une dichotomie entre l’aspect utilitaire et l’aspect esthétique du vêtement. Il est donc primordial de confronter les futurs stylistes à cette réalité afin qu’iels puissent imaginer de nouvelles alternatives. Il faut souhaiter que le travail de sensibilisation mené par le collectif Tu es canon continuera à guider la pratique artistique des étudiantexs dans la suite de leur parcours de formation.
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